Montagnes au cœur fondant, avec Olivier Vanderhaeghe

Par Hélène Pierre, de l’équipe Exploreur.

Pour ce portrait original, l’équipe Exploreur a demandé à des chercheurs de différentes disciplines de venir avec un objet évoquant leur thématique de recherche. Une occasion de parler de leurs travaux, de leur métier, des rencontres qui les ont marqués durant leur parcours et de ce qui les anime dans leur quotidien, en laboratoire ou sur le terrain.

Olivier Vanderhaeghe est enseignant-chercheur à l’Université Toulouse III - Paul Sabatier et mène ses recherches au sein du laboratoire Géosciences Environnement Toulouse (GET). L’une de ses motivations à exercer ce métier est sa liberté de penser et de s’exprimer. Étudiant, il se souvient avoir été séduit par ce professeur « bronzé, en short et chemise courte à carreaux » qui le sortait de l’amphi pour discuter au bar des prochaines sorties de terrain. Alors en clin d’œil à cette belle rencontre, il s’est pris au jeu de l’insolite en choisissant de nous présenter ses recherches en géologie avec un camembert coulant … vêtu d’un costume original.

« Ce costume, c’est une façon de briser la glace, de tendre la main de la transmission et d’autoriser la fantaisie. »

Olivier Vanderhaeghe étudie l’évolution de la croute continentale et en particulier l’évolution des chaines de montagnes.

« Ce camembert bien mûr reflète le comportement en profondeur d’une chaîne de montagne, dont la racine a vu sa température augmentée et s’est ramollie au cours du temps. »

Comme ce camembert constitué d’une croûte relativement rigide et d’un cœur fondant, la chaîne de montagnes, sous son apparente résistance aux épreuves du temps, cache un cœur tendre et chaud qui ne demande qu’à s’effondrer si on le laisse s’exprimer. La croûte rigide qui l’entoure est cohérente et constitue une charpente solide continue. Mais il suffit de rompre cette continuité pour permettre au cœur tendre de s’écouler sous l’effet de la gravité.  

Une chaîne de montagnes est le résultat d’une collision entre deux blocs continentaux dans le cadre de la tectonique des plaques qui a conduit à l’épaississement de la croûte continentale et la formation d’une racine, analogue à la partie immergée d’un iceberg. La croûte épaissie s’échauffe sous l’effet de la production de chaleur par la désintégration des éléments radioactifs (U, Th, K), particulièrement concentrés dans la croûte continentale. Dans un premier temps, la croûte réchauffée commence à fondre, se ramollit et ne peut plus soutenir des variations latérales de poids, ce qui va causer la formation de hauts plateaux comme le plateau du Tibet ou l’Altiplano dans les Andes. Ensuite, dans certains cas, les forces de la tectonique des plaques ne sont plus suffisantes pour contenir cette zone racine ramollie par la fusion partielle qui va alors s’écouler sous l’effet du poids de la chaine de montagnes. L’évolution de la racine des continents sous les chaines de montagnes et les processus magmatiques qui s’y déroulent induisent des transferts d’éléments et ont donc des implications directes sur la genèse de ressources minérales et énergétiques.

GET : Géosciences environnement Toulouse (CNRS, UT3 – Paul Sabatier, IRD, Cnes)

> Écoutez l’interview d'Olivier Vanderhaeghe. Réalisation : © Catherine Thèves et Vincent Ducasse (Université fédérale Toulouse Midi-Pyrénées, Campus FM Toulouse).