Le système immunitaire a-t-il un sexe ?

Partagez l'article

Vivant・Santé

Le système immunitaire a-t-il un sexe ?

Illustration Mathieu Bauchet
© Mathieu Bauchet, Matt.

Découvrir un chercheur par la radio : tel est le challenge de la chronique Cap sur les labos. Cette émission hebdomadaire vous emmène à la rencontre de la vie de la recherche. A chaque podcast : un chercheur présente ses projets avec leurs lots d’enjeux, d’envies et d’espoirs. Jean Charles Guéry et Sophie Laffont-Pradines répondent à la question « Le système immunitaire a-t-il un sexe ? ».

Par l'équipe Exploreur. Podcast réalisé par Camille Berjonneau et Pierre Lemos. Cap sur les labos est diffusé sur Campus FM Toulouse.

Selon qu’on est un homme ou une femme, notre système immunitaire diffère et influence l’évolution et les traitements des maladies infectieuses et auto-immunes. Des découvertes qui ouvrent la voie à des parcours médicaux personnalisés, pour des traitements plus adaptés.

Au Centre de physiopathologie Toulouse Purpan (CPTP), l’équipe dirigée par Jean-Charles Guery travaille depuis une dizaine d’années sur les différences liées au sexe dans l’immunité. « Il s’agit de comprendre les mécanismes qui sous-tendent les différences entre les sexes », résume la chercheuse Sophie Laffont-Pradines. « Une fois identifiés, on pourra imaginer découvrir de nouveaux mécanismes capables de favoriser l’immunité, de limiter le développement voire de traiter les maladies auto-immunes ».

Un système plus performant chez la femme

Si l’on sait depuis de le milieu du XXe siècle que des différences entre les systèmes immunitaires masculins et féminins existent, sur la base d’études statistiques conséquentes, la prise en compte du sexe dans les projets scientifiques biologiques ne date que d’une dizaine d’années. L’équipe du CPTP fait figure de pionnière en la matière, aux côtés de quelques laboratoires nord-américains.

Le système féminin porte deux chromosomes X, tandis qu'un système masculin porte un chromosome X et un Y. « Pour la plupart des maladies et pathogènes, il y a forcément des réponses différentes du corps selon le sexe », explique la chercheuse. C’est ainsi qu’on a découvert que le système immunitaire féminin est plus performant et réagit de façon plus robuste et plus grande face à une infection. Mais cela se retourne contre lui lors de maladies auto-immunes ou de rejets de greffe. En effet, l'œstrogène, hormone féminine, influence les cellules du système immunitaire, tandis que les androgènes, hormones stéroïdes mâles, limitent le développement et l’amplitude des réponses immunes.

Traitements sur mesure

Si l’on prend l’exemple de la grippe saisonnière, il a été prouvé que les doses de vaccin nécessaires pour obtenir une protection équivalente varient selon le sexe. De même, l’équipe a montré que les androgènes agissent sur l’asthme allergique. « Si l’on parvient à moduler les récepteurs d’hormones, on peut imaginer créer des substances capables de mimer l’action des androgènes et inhiber le développement de l’asthme allergique chez la femme, comme c’est déjà le cas dans le traitement des cancers », souligne Sophie Laffont-Pradines.

Le nouvel axe de travail de la chercheuse porte sur les différences liées au sexe dans le cas du cancer. Objectif : comprendre si les cellules, qui jouent un rôle clef dans le rejet des tumeurs, sont également régulées par les hormones. Avec, à la clef, de nouveaux traitements personnalisés plus efficaces dans la lutte anticancéreuse.

 

Jean-Charles Guéry, chercheur Inserm, et Sophie Laffont-Pradines, chercheuse CNRS, travaillent tous deux au Centre de physiopathologie Toulouse Purpan - CPTP (Inserm, CNRS, Université Toulouse III - Paul Sabatier)