Notre cerveau, cette force motrice avec Lilian Fautrelle
La série « Les 2 font la paire » met en scène des couples insolites… Un ou une scientifique et un objet. Découvrez pourquoi ils se sont choisis et ce qu’ils représentent l’un pour l’autre.
Par Hélène Pierre, de l’équipe Exploreur.
Pour ce portrait original, l’équipe Exploreur a demandé à des chercheurs de différentes disciplines de venir avec un objet évoquant leur thématique de recherche. Une occasion de parler de leurs travaux, de leur métier, des rencontres qui les ont marqués durant leur parcours et de ce qui les anime dans leur quotidien, en laboratoire ou sur le terrain.
Lilian Fautrelle est enseignant-chercheur à l’INU Champollion, au département STAPS à Rodez et réalise ses recherches au sein du l'unité Toulouse Neuro Imaging Center (ToNIC). Pour nous parler de ses travaux, il a fait le choix d’apporter deux balles de tennis décorées au feutre noir à la manière d’un émoji, l’un souriant, l'autre triste.
Le thème principal de ses recherches est le contrôle de la motricité humaine dans le domaine des neurosciences. Il s’intéresse à la manière dont le système nerveux central, c’est-à-dire notre cerveau et notre moelle épinière, pilote les mouvements du corps humain. Ses recherches fondamentales trouvent des applications concrètes dans l’entrainement sportif ainsi que dans le domaine de la santé, en réhabilitation motrice.
Actuellement, Lilian Fautrelle souhaite comprendre comment l’environnement émotionnel peut influencer la manière dont notre système nerveux central contrôle nos mouvements. En effet, pour un même mouvement, d’apparence similaire, la façon dont le cerveau commande le corps change en fonction du contexte affectif perçu.
Revenons un moment sur ces deux émojis souriant et triste. En plaçant des images perçues comme plaisantes ou déplaisantes derrière un bouton sur lequel appuyer, le mouvement est plus rapide et le temps de réaction plus court lorsque l’image est agréable. A l'inverse, le niveau de synchronisation entre les activations des muscles des jambes et celles des bras diminue significativement lorsque l'image est désagréable. À partir de ces résultats, nous pouvons prédire qu’à partir de la même posture, ces deux balles de tennis, étant successivement placées au même endroit par rapport à vous, vous attraperiez plus rapidement la balle avec l’émoji souriant plutôt que l’émoji triste.
« Je suis fasciné par la complexité des mécanismes du vivant et en particulier par celle du fonctionnement cérébral. »
Après avoir mis en lumière ce phénomène chez les personnes ne subissant aucun stress majeur, Lilian Fautrelle et son équipe s’intéressent aux personnes intervenant en situation hostile (pompiers, militaires) et aux sportifs de haut niveau. Lorsque la performance doit être restituée dans un contexte anxiogène (compétition, dangers), l’entrainement doit être capable de prendre en compte ces caractéristiques environnementales pour maximiser apprentissage et performance. L’objectif de ces recherches est d’obtenir, à niveau physique et technique égaux, la restitution de la plus haute performance possible même dans un cadre très stressant.
Mieux comprendre l’influence de l’affect dans les mécanismes de modulation de la commande musculaire envoyé par le système nerveux central permettra à terme d’améliorer les protocoles d’entrainement et de réhabilitation.
ToNIC : Toulouse Neuro Imaging Center (Inserm, Université Toulouse III – Paul Sabatier)
> Écoutez l’interview de Lilian Fautrelle. Réalisation : © Catherine Thèves et Vincent Ducasse (Université fédérale Toulouse Midi-Pyrénées, Campus FM Toulouse).